Aliments ultratransformés et cancer colo-rectal

Le cancer colorectal occupe la troisième position dans la hiérarchie des cancers en France. Son développement plutôt lent à partir de polypes permet un dépistage efficace par coloscopie tous les 5 ans chez les personnes considérées comme à risque. Des méthodes moins invasives sont parfois proposées :  recherche de sang dans les selles, coloscanner, sigmoïdoscopie qui n’explore que la partie terminale du côlon, utilisation de caméra pilules qui traversent le tube digestif… avec rien de vraiment satisfaisant, ces méthodes ne parvenant pas à démontrer un réel bénéfice sur la mortalité toutes causes confondues.
Il y a une prédisposition génétique bien établie pour ce cancer, c’est pourquoi le dépistage par coloscopie est recommandé si un ascendant direct a été atteint de ce cancer. il y a aussi des facteurs liés au mode de vie : le manque d »activité physique, le surpoids, la consommation excessive d’alcool, de viande rouge et de produits animaux transformés [1].
Une recherche sur l’impact de la consommation de produits ultra-transformés effectuée aux USA sur 200 000 personnes ( 50 000 hommes – 150 000 femmes) avec un suivi de 25 ans, a montré que les hommes consommant le plus d’aliments ultra-transformés, et en particulier à base de viande/volailles/fruits de mer, ainsi que des boissons sucrées de type soda, avaient un  risque accru de 29% de développer un cancer colorectal. En revanche, pas de surrisque démontré chez les femmes ! [2]
Les auteurs tentent d’expliquer cela par un choix de meilleure qualité chez les femmes, mais cela démontre surtout que ce genre d’étude sur les effets d’un mode alimentaire déclaré par les participants a souvent bien peu d’intérêt. La complexité de l’alimentation de chaque sujet, associée à celle des bénéfices et inconvénients nutritionnels qui varie selon les organismes rend les études statistiques bien peu adaptées. Celles-ci de font souvent qu’embrouiller en empilant des informations contradictoires.
On sait aujourd’hui que les aliments ultratransformés sont globalement néfastes sur la santé, et la nature de leur impact spécifique sur telle ou et elle maladie ne change rien à cela.

Références
1. D. E. O’Sullivan & al : Risk Factors for Early-Onset Colorectal Cancer: A Systematic Review and Meta-analysis – Clinical Gastroenterology and Hepatology, 2022, 20(6) : 1229-1240
2. Lu Wang & al : Association of ultra-processed food consumption with colorectal cancer risk among men and women: results from three prospective US cohort studies – BMJ, 2022,378:e068921

 

L’alimentation joue-t-elle un rôle dans la sévérité des infections à Covid 19

C’est une question qui se pose depuis le début de l’épidémie du fait que la sévérité est liée à la fois à la faible efficacité du système immunitaire et d’une réaction flambée inflammatoire. Immunité et inflammation sont en partie liées à la qualité nutritionnelle, cela semble donc évident.
Les premières évaluations vont en ce sens.
Des chercheurs ont établi un score simplifié qui se calcule en fonction de la proportion d’aliments favorables (végétaux non transformés, poissons gras, huile olive…) et défavorables (produits transformés par l’industrie agroalimentaire), avec des corrélations sur la qualité du microbiote et le niveau inflammatoire.
600 000 personnes ont ainsi pu être suivies grâce à une application smartphone. 31800 cas de Covid 19 survenus pendant l’observation ont permis de faire une corrélation en qualité alimentaire et sévérité des symptômes.
Globalement, les personnes ayant un score nutritionnel favorable ont eu un risque diminué de 40% de faire une forme grave(1).

Référence
Jordi Merino & al : Diet quality and risk and severity of COVID-19: a prospective cohort study – en preprint sur medrxiv

Un type de nutriment efficace contre l’hypertension… est-ce vraiment intéressant ?

Des chercheurs de l’université de Reading (Royaume uni) ont mené une étude de grande envergure sur 25600 sujets, qui a montré les effets favorables d’un import conséquents en polyphénols de la famille de flavonols, apportés notamment par les fruits, le thé vert, le chocolat (1).
Des résultats similaires sont obtenus en suivant le régime DASH (Dietary Approaches to Stop Hypertension) conçu pour les hypertendus, ou le régime méditerranéen qui est son inspirateur.
Une telle étude pourrait suggérer qu’il suffit d’apporter des flavonols pour obtenir les bénéfices, mais est-ce vraiment le cas ? Les personnes qui en consommaient davantage dans cette évaluation n’avaient-elles aucune autre différence alimentaire ?
Cette publication, comme beaucoup d’autres, nous amène à réfléchir sur l’intérêt des études alimentaires qui tendent à isoler un facteur parmi d’autres. Un article de l’association française pour l’information scientifique titrait : la plupart des recherches en nutrition sont biaisées voire fausses. Il y a en effet dans ce domaine tellement de facteurs de variation qu’il est impossible d’isoler les effets d’un facteur ponctuel, client ou nutriment. Cela fait certes de la matière à commenter sur les journaux, mais cela amène avant tout de la confusion.
On sait aujourd’hui qu’un changement alimentaire est bénéfique s’il améliore certains d’apports et ratios désormais bien connus. Plutôt que se focaliser sur un nutriment ou un aliment, il est bien plus avantageux de miser sur ces améliorations dans une diversité qui respecte le cadre de vie de chacun.
Pourquoi notamment mettre en avant les flavonols ou un régime DASH spécialement conçu pour l’hypertension alors que les bénéfices sont obtenus par le régime méditerranéen. Il serait bien plus utile de vérifier que le respect des ratios santé, quel que soit le régime et quels que soient les aliments consommés, est le facteur commun à tout ce qui provoque une amélioration. Cela laisserait à chacun davantage de liberté, donnerait un cadre pourvoyeur à son rythme, ce qui favoriserait probablement une meilleure adhésion.

Références :
1. Javier I. Ottaviani & al : Biomarker-estimated flavan-3-ol intake is associated with lower blood pressure in cross-sectional analysis in EPIC Norfolk – Scientific Reports volume 10, Article number: 17964 (2020)
2. Hervé Maisonneuve : La plupart des recherches en nutrition sont biaisées voire fausses – SPS n°326 Octobre / Décembre 2018

Covid 19 et nutrition : peut-on tirer des conclusions ?

L’objet de nombreuses recherches concerne les facteurs de vulnérabilité au Covid 19, notamment pourquoi des personnes font des formes graves : orages de cytokines chez les adultes et peut-être syndrome de Kawasaki chez les enfants.
Les liens se font avec les facteurs classiques retenus par la médecine : obésité, âge, maladies chroniques, traitements médicamenteux.
Il n’y a pas malheureusement pas de recherche avec les facteurs de terrains. Il est peu probable que des corrélations soient recherchées avec le statut nutritionnel, et encore moins avec les critères pertinents de nutrition santé.
Les quelques éléments d’observation attirent l’attention sur le zinc (dont la déficience accrue par l’infection virale favorise la perte de goût et d’odorat), le microbiote (la pauvreté de la diversité est un facteur commun de l’âge et du surpoids), la vitamine D (et son lien désormais  bien connu avec l’immunité). On pourrait supposer aussi que le terrain inflammatoire (aggravé par le déficit en oméga 3 et la consommation élevée de produits sucrés) et oxydant (favorisé par un apport faible en nutriments antioxydants) jouent un rôle dans les complications.
En fait, il y a  beaucoup de raisons de penser qu’une nutrition santé soit un vrai facteur de protection. Sera-t-il possible de le vérifier ?