Akkermansia muciniphila (AM) : quel destin pour la star du microbiote ?

Cela fait quelque temps que les propriétés d’Akkermansia muciniphila, quand cette bactérie est abondante les intestins font rêver (1) :
– Modulation de la perméabilité intestinale,
– Diminution de l’inflammation au niveau du tube digestif,
– Amélioration du métabolisme glucidique et lipidique.
La quantité dans les microbiotes varie d’un facteur 1 à 1000.
Un niveau faible est plus fréquemment retrouvé chez les personnes souffrant d’obésité, de diabète, de syndrome métabolique, de pathologies inflammatoires intestinales ou hépatiques, de psoriasis…
Un niveau élevé a été observé chez les centenaires en bonne santé.
C’est comme si on avait trouvé la panacée qui oriente résolument vers la santé optimale.

Depuis 2018, des tests PCR permettent  la détermination la présence d’AM, en nombre de génome par gramme de selles (2). Ils ne figurent cependant pas actuellement au catalogue des laboratoires analysants le microbiote.
En 2021, L’EFSA, l’agence européenne de sécurité alimentaire, a donné un avis positif comme complément alimentaire (3).

La prochaine étape est la commercialisation d’un probiotique. Elle se fait attendre de façon surprenante vu que les bénéfices de cette bactérie sont connus depuis plusieurs années. Problème technique ? Stratégie commerciale pour une poule aux œufs d’or qu’il faut préserver ?
L’avenir nous dira comment se produit arrivera sur le marché, quels effets immédiats il pourra donner, et quel bénéfice à long terme pourront être validés.

Le raisonnement qui part d’une corrélation entre un paramètre (abondance d’AM dans le microbiote) et des bénéfices santé sur la base d’analyse génomique dans les selles pour conduire à une supplémentation par un probiotique oublie que la complexité du vivant ne suit pas toujours la logique linéaire de la médecine technologique :
– Les analyses de microbiote dans les selles sont à relativiser : les bactéries éliminées ne reflètent pas forcément celles qui sont actives au niveau de l’intestin (4)
– La corrélation entre AM et santé ne veut pas dire relation de cause à effet. Le développement de la bactérie pourrait aussi être la conséquence d’un terrain biologique favorable qui précède son apparition.
– Une bactérie apportée par un probiotique ne réensemence pas un microbiote. Si elle apport un bénéfice, pour maintenir ce bénéfice, il faut la prendre en continu.

En fait, il s’établit un équilibre entre la physiologie globale d’un organisme, ses échanges avec l’environnement et son microbiote intestinal, dans les limites du développement de celui-ci pendant l’enfance. Prendre un probiotique entre dans les échanges environnementaux. Quand la prise s’arrête, on retrouve généralement la situation d’avant la prise. La clef de la santé par le microbiote est un mode de vie qui favorise la diversité de celui-ci, bien avant la prise de probiotique qui n’est pas une démarche durable.

Références :
1. H. Plovier & P.D. Cani : Akkermansia muciniphila, une bactérie pour lutter contre le syndrome métabolique. Optimisation des effets bénéfiques et évaluation de la sûreté chez l’homme – Med Sci (Paris). 33(4): 373–375.
2. Recherche d’Akkermansia dans les selles 
3. Akkermansia muciniphila : un avis positif de l’EFSA en tant que novel food
4. Biologie Médicale intégrative