SOMMAIRE
La micronutrition est souvent considérée comme une thérapie naturelle. Est-ce vraiment le cas ?
La question revient à définir ce que veut dire naturel en santé, ce qui varie selon le critère de référence.
Qu’est-ce la micronutrition ?
La micronutrition est une approche thérapeutique visant à apporter sous forme de compléments alimentaire des micronutriments, soit parce qu’ils sont déficients, soit parce que leur surplus apporte un bénéfice santé dans une situation particulière.
Selon l’Institut Européen de Diététique et Micronutrition : c’est une approche de la nutrition médicalisée adaptée à chacun.
La micronutrition est une discipline dont le fondement est scientifique, qui s’appuie sur la technologie, mais qui pourtant intéresse peu la médecine, comme la grande majorité des solutions qui échappent à l’industrie pharmaceutique.
Qu’est-ce qu’un complément alimentaire naturel ?
Il y a cinq critères sur lesquels on peut discuter la qualité naturelle ou non d’un complément alimentaire.
- Structure naturelle : la substance administrée est connue du processus vivant, qui la produit par biosynthèse dans certains organismes. C’est le minimum pour revendiquer la qualité naturelle !
Il n’est, pas toujours respecté quand la synthèse chimique produit des molécules de configuration inconnue de la nature, ce qui est devenu rare parmi les ingrédients utilisés en micronutrition. L’acide D ascorbique, forme inactive de la vitamine C n’est plus utilisé depuis longtemps. La cyanocobalamine n’existe pas dans la nature, mais libère dans l’organisme de la cobalamine de structure naturelle. La vitamine E de synthèse contient des formes artificielles et inactives.
- Origine naturelle : une substance de structure naturelle peut avoir une origine naturelle ou être reproduite à l’identique par hémisynthèse (transformation d’un substrat extrait de la nature), ou par synthèse chimique totale. On obtient dans ce cas en quantité importante un ingrédient que l’on peut purifier. Rien ne le différencie dans sa structure de son équivalent biosynthétisé par un organisme vivant. Une question se pose alors : une structure a-t-elle la mémoire de son origine ? Et si oui, celle-ci se manifeste-t-elle de manière subtile (vibratoire) dans les interactions biologiques ? Il n’y a que des réponses hypothétiques à ces interrogations.
- Matrice naturelle: un aliment naturel est un ensemble de nutriments insérés dans une matrice aqueuse dont l’état est de type colloïdal. C’est le contexte connu des organismes vivants depuis leurs origines, auquel ils sont adaptés, permettant l’assimilation et la métabolisation optimale des substances nutritives.
En alimentation, on appelle produits ultra-transformés les aliments industriels préparés par addition d’ingrédients, sans une trame biologique qui unifie l’ensemble comme une structure vivante. On considère alors qu’ils ont perdu leur caractère naturel.
En complémentation alimentaire, par analogie, un comprimé de spiruline qui a conservé la trame vivante des microalgues est un produit naturel, alors qu’une gélule ou un comprimé dans lequel sont empilés divers nutriments purifiés est le stade ultime de l’ultra-transformation.
- Proportions naturelles : dans les organismes vivants, les multiples composants se répartissent selon des proportions qui ont une certaine constance, de sorte l’alimentation des uns qui consomme des organismes d’autres espèces maintient ces proportions. Ainsi, tant que l’alimentation humaine était naturelle et diversifiée, certains ratios (ω6/ω3 ; K/Na ; Ca/Mg…) étaient préservés. Depuis l’intensification de l’agriculture qui a sélectionné certaines espèces et l’industrialisation de l’agroalimentaire qui privilégie une quantité limitée d’ingrédients, ces ratios ne sont plus respectés, et cela a eu de nombreuses répercussions sur la santé à long terme.
En complémentation alimentaire, les produits formulés respectent plus ou moins ces proportions pour les nutriments inclus dans la préparation, mais jamais pour tous comme le fait un produit d’origine naturelle qui n’a subi aucun processus de transformation destiné à concentrer certains de ses composants.
- Mode d’action naturel : quand les nutriments arrivent en quantités et proportions naturelles, ils viennent nourrir le processus physiologique en lui fournissant les éléments dont il a besoin, tout en respectant son orientation auto-organisée.
Quand on apporte un médicament de synthèse, celui-ci vient perturber le fonctionnement biologique pour l’orienter dans un sens choisi, destiné à soigner une anomalie. Comme le processus physiologique spontané est contrarié, il se réadapte au mieux, ce qui crée des effets collatéraux parfois néfastes.
En complémentation, l’apport de nutriments dans un contexte inhabituel, ou avec des doses sans commune mesure avec les besoins, force une plusieurs séquences métaboliques. La situation étant inconnue de la mémoire biologique, l’auto-organisation métabolique s’adapte au mieux, ce qui peut conduire à divers réarrangements. Les conséquences sont difficiles à évaluer. Il s’agit alors d’une allopathie nutritionnelle, avec des bénéfices à court terme que l’on recherche, et de possibles effets collatéraux à moyen ou long terme dont on ignore les conséquences
La micronutrition est-elle naturelle ?
En dehors des microalgues et quelques
« superaliments » dont la composition spontanée permet à elle seule une complémentation, les compléments alimentaires contiennent des ingrédients de structure naturelle, issus de la synthèse ou de l’extraction à partir de végétaux, concentrés dans des préparations sans trame vivante (produits ultra-transformés), avec des quantités et proportions qui peuvent sortir des limites auxquelles les organismes sont habitués et pour lesquelles ils sont équipés, et dans un objectif qui est de combler des déficiences ou de suralimenter une séquence métabolique pour favoriser les effets que l’on souhaite obtenir.
Il y a donc de diverses formes de micronutrition, et le seuil qui délimiterait son caractère naturel est subjectif, dépendant des points de vue.
Micronutrition : nutritive ou curative ?
Un mode d’action nutritif (1) apporte aux organismes les nutriments dont il a besoin pour que son programme biologique fonctionne de manière optimale. L’apport extérieur est au service d’une auto-organisation qui maintient le processus vivant avec sa propre intelligence. Il s’agit de la plus naturelle des approches.
Un mode d’action curatif apporte des substances inhabituelles, ou des substances habituelles dans des conditions ou quantités inhabituelles, destinées à obtenir un effet désiré. C’est dans ce cas l’intelligence humaine qui tente de modifier la biologie qui doit alors s’adapter. Nous sommes dans une démarche allopathique, que l’on peut considérer comme naturelle ou non selon ce qui est apporté, et selon le point de vue.
La micronutrition, selon ce qu’elle apporte, s’échelonne sur une ligne qui va du tout nutritif au fortement curatif avec tous les intermédiaires.
Les points de vue se répartissent entre deux extrêmes :
– L’utilisation d’un mode curatif est une violation de la santé naturelle. C’est un extrémisme qui retire à l’humanité le pouvoir de participer à ce qui la concerne, et d’améliorer la vie naturelle qui n’a pas toujours la possibilité de s’auto-guérir et crée parfois de pénibles inconforts.
– L’utilisation des thérapies curatives (y compris la micronutrition) est sans effets collatéraux parce que ce sont des approches naturelles. C’est une vision bien étroite qui considère les organismes vivants comme des machines, et l’intelligence humaine égale à celle de la vie.
Un soin curatif, dans une vision plus large, se choisit en mettant en balance ses effets bénéfiques attendus et les conséquences défavorables possibles. En cela, il est un art qui fait de son mieux en s’appuyant sur une compétence et une éthique. Il fait partie des outils thérapeutiques d’une médecine globale intégrative
Quelle place pour la micronutrition ?
– En prévention, la micronutrition n’a jamais pu obtenir dans les évaluations des effets aussi bénéfiques qu’une alimentation optimale. C’est logique. Une prévention globale s’appuie sur l’intelligence des organismes et un apport de nutriment sur une mode nutritif. Le fait de forcer la prévention sur une pathologie que l’on craint ou selon les critères auquel on croit, pourrait avoir des effets collatéraux néfastes et imprévisibles sur des aspects que l’on oublie ou que l’on ignore.
L’alimentation optimisée est un socle préventif qui sauf pathologie particulière est suffisant. L’affirmation selon laquelle vivre dans un environnement inadapté aux besoins des organismes nécessite de se complémenter est un bel argument marketing, qui s’appuie sur des intérêts économiques ou idéologiques. L’environnement a souvent changé. Les organismes savent s’adapter, dès lors que l’on respecte les fondamentaux. Du point de vue nutrition, il est tout à fait possible de répondre à nos besoins sans complémentation.
– En situation pathologique, il est souvent bénéfique d’intervenir au-delà de la simple réponse aux besoins de l’organisme par le mode de vie. La micronutrition a alors toute sa place, parmi les autres thérapies. Elle demande alors une compétence capable d’utiliser les formulations adaptées à la situation, de choisir la durée de cure adéquate et de prévoir dans quelles conditions elle se terminera. Il est alors utile de savoir distinguer dans les informations données, ce qui est de l’ordre de la science, et ce qui est de l’interprétation favorable au produit, car l’information est rarement donnée par des auteurs dépourvus de conflits d’intérêts.
L’exemple des multivitamines
Il n’y a pas de consensus sur l’utilité de ces compléments (2). Ils sont justifiés par le fait que de nombreuses personnes n’auraient pas les apports suffisants en certains nutriments (vitamines, minéraux). C’est un constat auquel on peut aussi répondre que cela est dû à une alimentation non optimisée, et aussi qu’il n’y a pas de moyen fiable de déterminer les déficiences. Les besoins sont variables selon chacun. Les apports journaliers recommandés (AJR), tels qu’ils sont calculés, fixent un seul chiffre pour garantir la couverture des besoins de tous, et sont donc surestimés pour la plupart. Les dosages de micronutriments dans le sang ont une valeur constable (3).
Quel est leur intérêt ?
– En prévention générale, l’intérêt serait de limiter les dégâts d’une alimentation déficiente, ce qui nécessiterait une prise continue, toute la vie. La spiruline est alors, d’un point de vue nutritif, la solution qui regroupe le maximum de qualité naturelle et de réponse adaptée aux besoins.
– Dans certains contextes physiologiques ayant une durée limitée dans la vie : grossesse, sport intensif, croissance active, difficultés liées au vieillissement, certaines complémentations ont montré des effets bénéfiques. L’intérêt est alors de choisir des formulations adéquates et de les prévoir pour toute la durée de ce contexte pour ne pas créer une cassure biologique à la fin de la cure.
– Dans certains contextes pathologiques, le soutien micronutritionnel peut être précieux : soit pour soutenir un programme thérapeutique, soit pour accélérer la phase de récupération après un accident, une maladie aiguë, un burn-out.
Les situations de burn-out, souvent accompagnées par un simple suivi psychologique, ont vraiment avantage à être traitées par une complémentation large en micronutriments actifs. L’épuisement a dans ce contexte une forte composante biologique, qui mérite un soutien biologique pour aider la récupération psychologique.
RÉFÉRENCES
- Les 3 modes d’action : curatif, nutritif, informatif sont décrits dans le livre Santé Vivante, chapitre IV,
- Faut-il prendre des multivitamines ? Dossier – Lanutrition.fr
- L’intérêt du dosage des vitamines et oligoélément est évalué dans le livre : Biologie médicale intégrative – chapitre IX-B
Consultant Formateur - Nutrition, psychologie et santé intégratives