L’huile de colza toxique, une intox construite sur des amalgames

La mise en avant de la toxicité de l’huile de Colza qui se répand sur les réseaux sociaux remet-elle en cause sa préconisation comme huile d’assaisonnement en nutrition santé ?
Le colza résulte du croisement d’un chou et d’une navette, une autre espèce de brassicacées qui s’est produit naturellement il y a plus de 3 000 ans. Il est impossible de dire si cela s’est fait à l’état sauvage ou dans un potager. Dans tous les cas, ce n’est pas un croisement forcé. Il a été plus récemment sélectionné sous deux formes, le colza dont on récolte les graines pour faire de l’huile, le rutabaga dont la racine est consommée comme un navet.

L’huile de colza originelle contient de l’acide érucique (acide 13-docosénoïque, mono-insaturé en C22) dont la toxicité sur l’animal a été révélée dans les années 1960. Elle n’a jamais été vraiment confirmée, et l’EFSA reconnaît aujourd’hui un risque qui ne concerne que les enfants fortement exposés (1).
Suite aux révélations sur l’acide érucique, une démarche rigoureuse de sélection a isolé des variants qui ont été nommés canola au Canada (Canadian oil low acid) et colza 00 en Europe. Ce sont aujourd’hui les seules variétés cultivées pour la consommation humaine. Elles contiennent de faibles quantités d’acide érucique, obligatoirement inférieur à 2 %, généralement entre 0,1 et 0,5 %, et sont reconnues comme sécures.
Il existe aussi des variétés de colza oléique (colza 000 ou colza HOLL) qui sont riches en acides gras monoinsaturés, ce qui perd l’intérêt nutritionnel lié à la présence de polyinsaturés avec une proportion notable d’acide alpha-linolénique (oméga3).

La mauvaise réputation de l’huile Colza a commencé dans les années 1970, en mettant en avant la toxicité de l’acide érucique. Dans les années 1980, une mystérieuse série de morts en Espagne a été reliée à la consommation d’une huile de colza frelatée (2). Bien que ce soit la malfaçon qui ait induit la toxicité, la réputation du colza s’est entachée d’une couche supplémentaire.
Plus récemment, dans son blog bien documenté, l’américain Joseph Mercola, présente l’huile de canola, s’appuyant sur une étude sur les souris publiée dans Nature, comme un poison progressif qui dégrade la santé, notamment celle du cerveau et favorise la prise de poids. L’article ne précise pas le type d’huile de colza utilisée, qui est très probablement une production industrielle de type raffinée, avec tous les inconvénients de ce mode de production que l’on connaît.
Parmi les critiques, on trouve aussi le fait que lorsqu’elle est utilisée la cuisson, les oméga 3 sont dénaturés, ce qui est vrai, c’est la raison pour laquelle cette huile n’est pas une huile de cuisson.

En résumé, rien de nouveau qui contredise les préconisations de nutrition santé (4) : éviter toutes les huiles industrielles raffinées, et utiliser l’huile vierge de colza seulement pour les assaisonnements. Elle répond, pour un coût modéré, aux besoins en oméga 3 végétaux (acide alpha-linolénique)

Références :
1. EFSA : L’acide érucique, un risque sanitaire possible pour les enfants fortement exposés
2. La vérité sur le scandale de l’huile frelatée en Espagne
3. Joseph Mercola : Il a été prouvé que l’huile de canola détruit votre corps et votre esprit
4. Elisabetta Lauretti & Domenico Praticò : Effect of canola oil consumption on memory, synapse and neuropathology in the triple transgenic mouse model of Alzheimer’s disease – Nature , Scientific Reports, volume 7, Article 17134 (2017)
5. Nutrition Santé Essentielle